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L’aventure rocambolesque du fronton du Panthéon

Surplombant le quartier latin de sa somptueuse architecture, le Panthéon fait partie des monuments les plus emblématiques de Paris. Ordonné au 18e siècle par le roi Louis XV, qui avait promis d’édifier une somptueuse église en l’honneur de Sainte-Geneviève s’il guérissait d’une terrible maladie, son fronton fut pendant des siècles un enjeu politique majeur.

Et le fruit d’une longue, et rocambolesque, aventure…

Le 1er fronton du Panthéon

Une fois guéri, Louis XV tint sa promesse et ordonna en 1754 la construction d’une église en remplacement de l’ancienne abbaye située au sommet de la montagne Sainte-Geneviève. Jacques-Germain Soufflot fut chargé de mener ce projet. Mais l’église, terminée en 1790, fut affectée dès 1791 par l’Assemblée Nationale au culte des Grands Hommes de la nation française.

La Révolution, qui a éclaté deux ans plus tôt, souhaite en effet faire du Panthéon le pendant républicain et laïque de la Basilique Saint-Denis, nécropole royale.

Le premier fronton fut réalisé en 1774 par le sculpteur Nicolas Coustou. Il représentait un bas-relief surnommé L’Adoration de la Croix, où des chérubins et anges entouraient une croix flamboyante.

Le 1er août 1791, l’assemblée ordonna qu’à la place de l’inscription latine du fronton soit gravé « Aux grands Hommes la Patrie Reconnaissante ». Puis il fut décidé de remplacer le bas-relief par une oeuvre plus conforme aux idéaux révolutionnaires.

Le 2ème fronton du Panthéon

À nouvelle inscription, nouveau fronton. À partir de 1791, une femme debout couronne les vertus civiques et guerrières.

Mais la Révolution cède bientôt sa place à l’Empire Napoléonien… En 1806, Napoléon décide de rendre une partie du monument au culte catholique. Le fronton, jugé trop révolutionnaire, fut recouvert d’un voile pendant près de 10 ans.

Le 3ème fronton du Panthéon

En 1815, Louis XVIII rétablit la monarchie en France, et souhaite réaffirmer l’importance de l’église catholique en rendant l’intégralité du Panthéon au culte. Le Panthéon est renommé Église Sainte-Geneviève.

Mais puisque cela ne suffisait pas, il fut décidé de supprimer le fronton (voilé depuis 1806) et de remplacer l’ancienne inscription. « Aux Grands Hommes la Patrie Reconnaissante » laisse sa place à « D.O.M. sub invocat. S. Genovefae. Lud. XV dicavit. Lud. XVIII restituait » (Au Dieu très bon et très grand sous l’invocation de Sainte Geneviève, Louis XV l’a dédiée, Louis XVIII l’a restituée).

Dans un premier temps, on pensa à ne pas détruire le précédent fronton, mais à simplement le « christianiser ». Finalement, l’architecte Baltard réalisa une oeuvre totalement nouvelle représentant une grande croix rayonnante.

Le 4ème fronton du Panthéon

En 1830, le régime de Louis-Philippe d’Orléans souhaite afficher son lien avec la Révolution. L’un de ses premiers actes ? Rebaptiser « Sainte-Geneviève » en « Panthéon », bien sûr ! Et inscrire à nouveau sur la façade « Aux Grands Hommes la patrie Reconnaissante ». Problème, la croix flamboyante de Baltard n’a plus aucun rapport avec la nouvelle vocation du bâtiment. Un nouveau fronton est donc commandé !

La réalisation du nouveau fronton fut confiée au sculpteur David D’angers, dont le thème  était La Patrie distribuant aux grands hommes, civils et militaires, des couronnes que lui tend la liberté tandis que l’histoire inscrit leur nom.

L’artiste dut résister à de nombreuses pressions, et après 7 longues années caché du public, le fronton fut inauguré le 31 août 1837, succédant à ceux de Coustou, Moitte et Baltard. C’est ce quatrième et dernier fronton que nous pouvons admirer aujourd’hui !

Détail du fronton actuel

Allégorie de la Révolution, on retrouve sur ce fronton des hommes qui, dans leurs disciplines respectives, ont contribué au progrès de la nation. Au centre, la Patrie distribue des couronnes aux hommes qu’elle honore, entourée de la Liberté et de l’Histoire. À ses pieds, le coq républicain et l’aigle impérial sont réunis dans une seule et même couronne.

 À droite de la Patrie, l’ordre civil est représenté :

 De gauche à droite : Malesherbes, Mirabeau, Monge, Fénelon. Un peu plus loin sont assis côte à côte Voltaire et Rousseau :

À gauche de la Patrie, l’ordre militaire.  Habillé de l’uniforme Républicain, le général Bonaparte vient chercher sa couronne :

Un hommage aux personnalités militaires où figurent mêmes des élèves de l’école militaire.

Si le fronton n’a pas bougé depuis 1837, le monument reste quant à lui encore et toujours le miroir d’une réflexion nationale. Preuve en est avec la dernière entrée au Panthéon de quatre héros de la Résistance en 2015. Plus qu’un hommage national, une décision éminemment politique…

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